Villes, climat et inégalités

Pour une transition écologique juste et féministe à Montréal

Décembre 2022

Naomie Léonard, étudiante au doctorat en études urbaines (INRS), Hélène Madénian, étudiante au doctorat en études urbaines (INRS) et Gabrielle Perras St-Jean, étudiante au doctorat en études urbaines (INRS)

Introduction

Les politiques publiques et environnementales omettent encore largement de considérer le fait que les préoccupations, les impacts et les solutions de la lutte aux changements climatiques sont différenciés en fonction du genre. Ce dernier joue pourtant un rôle déterminant dans la manière dont la crise climatique est vécue au quotidien, comme le soulignent les plus récents rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et d’autres études scientifiques. Les femmes[1], comme groupe social hétérogène, sont généralement plus vulnérables aux effets des changements climatiques. Résultats de processus sociohistoriques et économiques, ces vulnérabilités ne les empêchent pas d’être des actrices importantes, bien que souvent invisibilisées, dans la lutte aux changements climatiques (Gaard, 2015).

Ne faisant pas exception, dans son Plan climat 2020-2030 – Pour une ville inclusive, résiliente et carboneutre présenté en décembre 2020, la Ville de Montréal évacue complètement la question du genre dans son analyse de la situation et des solutions envisagées pour faire face aux effets des changements climatiques. C’est pour donner suite à cet état des lieux, et dans une perspective de transition écologique juste, que le Conseil des Montréalaises a commandé une recherche visant à documenter les impacts des changements climatiques sur les Montréalaises, pour ensuite formuler des recommandations à la Ville de Montréal.

Dans le cadre de sa lutte contre les changements climatiques, prendre en considération le genre dans une perspective intersectionnelle permettrait à la Ville de Montréal d’éviter certains écueils comme la reproduction de biais et stéréotypes sexistes et l’aggravation des inégalités entre les genres et entre les femmes elles-mêmes. Ce texte est un résumé de la recherche qui a mené à la publication de l’Avis du Conseil des Montréalaises pour une transition écologique juste et féministe à Montréal, le 2 novembre 2022.

Revue de la littérature[2]

Si les impacts des changements climatiques en fonction du genre sont de mieux en mieux documentés, cette question demeure sous-étudiée dans les villes occidentales. Cette recherche s’appuie principalement sur la littérature[3] portant sur les réalités urbaines et du Nord global. Compte tenu du temps, de l’espace et du mandat, l’approche intersectionnelle adoptée ici n’est que partielle. Il faut cependant garder en tête que « les femmes » n’incarnent pas un groupe monolithique et qu’elles ne partagent pas une expérience universelle de cette vulnérabilité en contexte de crise climatique (Waldron, 2018).

Aussi, bien que le contexte de cette recherche soit particulièrement axé sur les vulnérabilités des femmes en contexte de changements climatiques, il ne faut en aucun cas naturaliser les femmes dans des positions de victimes ou de sauveuses (Arora-Jonsson et al., 2016; Gay-Antaki, 2020; Resurrección, 2013). La vulnérabilité fait ici référence au niveau d’exposition et de sensibilité aux impacts des changements climatiques combiné aux capacités d’adaptation, elles-mêmes influencées par des facteurs sociaux, économiques, politiques, culturels et autres (Eastin, 2018; Rochette, 2016; Sellers, 2016). La vulnérabilité aux changements climatiques est bien le résultat d’injustices et d’inégalités structurelles (Gaard, 2015; Khosla et Masaud, 2010; Resurrección et al., 2019).

La revue de la littérature révèle que le genre est l’une des dimensions influençant l’expérience de la crise climatique. Il agit tant sur les perceptions de l’ampleur de la crise et sur ses effets que sur les types de solutions (adaptation ou atténuation) envisagées afin d’y faire face (Bee et al., 2015; IFPRI, 2012; Köhler et al., 2019; Rochette, 2018c). Les impacts des changements climatiques marqués par le genre peuvent être regroupés en quatre dimensions principales. Premièrement, l’assignation au travail reproductif et une plus grande précarité économique influencent largement la vulnérabilité des femmes aux changements climatiques (IPCC, 2022; Weiss, 2012). Puis, les impacts sur la santé globale, notamment mentale, et à long terme d’un événement extrême seraient plus intenses chez les femmes, notamment dû à l’assignation au travail reproductif (Waldron, 2018; Sellers, 2016). L’augmentation des violences physiques, psychologiques et sexuelles envers les femmes lors d’événements climatiques extrêmes constitue la troisième dimension genrée des impacts (Perkins et Peat, 2017). Finalement, les changements climatiques participent à l’accroissement des inégalités entre les hommes et les femmes, et entre les femmes, notamment en renforçant la division sexuelle du travail assignant les femmes aux tâches reproductives (Eastin, 2018).

Cette plus grande prise en charge des responsabilités relatives au travail reproductif (tâches domestiques et travail de care[4]) engendre un degré plus important de vulnérabilité aux effets des changements climatiques et explique en partie pourquoi les femmes sont moins climatosceptiques que les hommes (Fletcher, 2017; Gaard, 2015; IFPRI, 2012; Weiss, 2012). Étant plus lucides face aux enjeux des changements climatiques, elles ont également une sensibilité accrue et un pragmatisme se traduisant par davantage d’émotions négatives (p. ex. sentiment d’impuissance, colère, tristesse) (Champagne St-Arnaud et al., 2021).

Au-delà de leur vulnérabilité, il est aussi nécessaire de reconnaître leur rôle en tant qu’agentes de changements positifs (Figueiredo et Perkins, 2013; McGregor, 2008; Perkins, 2017; Prindeville et Bretting, 1998; Rainey et Johnson, 2009; Rochette et al., 2013; Rodriguez Acha, 2017; Waldron, 2018). Les femmes sont généralement plus engagées dans l’action climatique, bien que cela ne se reflète pas dans les sphères décisionnelles permettant d’agir sur ces enjeux (Papineau, 2017; Sellers, 2016). Cette sous-représentation dans les instances décisionnelles pose deux problèmes. Tout d’abord, puisque les femmes tendent à favoriser des types de solutions (atténuation ou adaptation) axées sur la vie quotidienne et les modalités de reproduction sociale individuelle et collective, nous nous privons collectivement de nombreuses solutions (Griffin Cohen, 2017; Faulkner, 2000; Rochette et al., 2013; Swim et al., 2018; WEN/NFWI, 2007). De plus, les mesures économiques et technoscientifiques, généralement valorisées par les hommes, ont des effets différenciés en fonction du genre, renforçant parfois les inégalités entre les hommes et les femmes et entre les femmes elles-mêmes (Allwood, 2020; Dymén et al., 2013).

En milieu urbain, les inégalités spatiales influencent le degré de vulnérabilité climatique des individus et des communautés. Elles accentuent particulièrement les risques encourus chez des populations déjà précarisées sur le plan socioéconomique (Alber et al., 2017; Khosla et Masaud, 2010). La population citadine a d’ailleurs tendance à s’appuyer davantage sur les infrastructures et services offerts par sa municipalité et moins sur des réseaux de relations et d’infrastructures informelles. Toutefois, l’accès à ces infrastructures et services est largement influencé par différents facteurs sociaux (Ranganathan et Bratman, 2021; Thomas et al., 2019; Wilby et Keenan, 2012; Alber, 2011).

Pour résumer, 1) le genre influence la manière dont la crise climatique est vécue, mais il ne doit pas être la seule dimension prise en considération lors de l’évaluation des impacts et la mise sur pied d’actions d’atténuation ou d’adaptation; 2) la vulnérabilité accrue des femmes résulte de processus et facteurs socioenvironnementaux et historiques et n’est pas également répartie entre les femmes; il est en outre possible – voire nécessaire – d’agir concomitamment contre les impacts climatiques et pour l’amélioration de l’égalité entre les genres, puisque de nombreux cobénéfices peuvent émaner d’une telle alliance (Ergas et York, 2012). En effet, considérant ces différenciations genrées dans la perception et les effets de la crise climatique ainsi que les actions prises face à celle-ci, la littérature soutient qu’il faut adapter les stratégies d’action, de communication et de sensibilisation en fonction de ce constat afin de ne pas amplifier des disparités sociales existantes. Autrement dit, il est non seulement possible, mais salutaire de réfléchir à une transition écologique juste en prenant en considération les inégalités sociales de genre dans une perspective intersectionnelle, ce que permet une analyse différenciée selon les sexes (ADS) (Chalifour, 2017; Réseau des femmes en environnement, 2016; Rochette, 2016).

Étude de cas

Cette recherche avait trois objectifs principaux : 1) présenter un état des connaissances sur les changements climatiques à travers le prisme du genre en milieu urbain dans le Nord global; 2) dresser un portrait de la situation à Montréal; 3) à la lumière des constats posés, adresser différentes recommandations à la Ville de Montréal.

Afin d’accomplir ce mandat, nous avons mené une démarche qualitative basée sur les principes de la recherche féministe, visant à valoriser les savoirs et expériences des Montréalaises. Reconnaissant l’imbrication des systèmes d’oppression, nous avons adopté une approche intersectionnelle tant dans notre échantillonnage que dans notre analyse. Bien que ce portrait ne soit pas représentatif au sens statistique, nous avons porté une attention particulière à intégrer les perspectives et les réalités de Montréalaises d’origines diverses, d’orientations sexuelles et d’âges variés, aux capacités multiples et provenant de milieux socioéconomiques différents.

Le déploiement de la méthode comportait deux phases principales. La première consistait en une revue de la littérature scientifique récente sur les thématiques du genre et des changements climatiques en milieu urbain ainsi qu’en des entretiens exploratoires auprès de trois expertes québécoises sur le sujet. Cette étape a révélé que la vulnérabilité climatique n’est pas « naturelle », mais plutôt le résultat de la combinaison de différents facteurs socioéconomiques, d’inégalités sociospatiales et de décisions d’aménagement du territoire.

La deuxième phase nous a conduites à mener un groupe de discussion avec des militantes impliquées au sein de diverses mobilisations citoyennes touchant aux questions de justice sociale et environnementale dans la métropole, et 16 entretiens semi-dirigés auprès d’expertes québécoises sur les questions de genre, d’environnement, d’aménagement urbain, de santé et de droits de la personne, et d’intervenantes du milieu communautaire. Les organismes communautaires invités à intervenir ont été sélectionnés à partir de la superposition des cartes montréalaises des îlots de chaleur, des zones inondables répertoriées et de la défavorisation matérielle et sociale (Bazargani, 2019; Ville de Montréal, 2017)[5], qui ont permis d’identifier les secteurs les plus vulnérables. Nous avons par ailleurs tenu compte de l’implication de ces organismes auprès d’une population féminine et de leur disponibilité. C’est un total de 23 personnes qui ont pris part à la collecte de données.

Résultats

Le principal constat que la collecte de données nous révèle est la variation des conditions de vie des Montréalaises en fonction des quartiers, et l’influence de ces variations sur la résilience de cette population face aux changements climatiques. Les enjeux soulevés par les participantes se regroupent sous quatre thèmes principaux : le logement, les transports et la mobilité, les parcs et l’accès à la nature, ainsi que les services et commerces de proximité. Il faut ici noter l’interdépendance entre ces enjeux et leurs liens avec la résilience aux changements climatiques tel que nous le verrons ci-bas.

L’accès à des logements abordables et de qualité

Les liens entre la qualité du logement et la résilience face aux effets des changements climatiques ont été démontrés dans la littérature. Le manque de logements sociaux, abordables et adéquats est de plus en plus criant à Montréal. Les personnes mal logées – logement trop petit, vétuste ou mal isolé – ne bénéficient pas du même facteur de protection offert par leur toit et sont conséquemment plus vulnérables aux effets des changements climatiques (Rochette, 2016). Par exemple, les logements vétustes ou mal isolés entraînent un gaspillage énergétique affectant le bien-être des locataires tant en période de froid que durant les vagues de chaleur. Ces problèmes de logement ne sont pas aléatoires, mais bien le fruit de préjugés et de discriminations systémiques qui les forcent à rester dans des logements et des quartiers inadéquats ou à y emménager (TGFM, 2021). Il existe malheureusement peu de leviers pour faire changer la situation, et ce, particulièrement pour les locataires. En plus des impacts sur la santé globale (mentale et physique) des individus, vivre dans un logement accessible, sain et adéquat est « un important prérequis pour la participation citoyenne et politique des Montréalaises » (TGFM, 2019). Il va sans dire que pour les femmes en situation d’itinérance, la vulnérabilité globale est exacerbée.

Les transports et la mobilité

Les enjeux relatifs au transport et à la mobilité sont au cœur de la lutte aux changements climatiques. La mobilité est centrale au rythme de vie urbain et est un facteur déterminant de l’intégration sociale et économique, et donc de la qualité de vie, des individus (Conseil des Montréalaises, 2009; Jalon, 2021). Actuellement, dans plusieurs quartiers « périphériques » de la métropole, les femmes qui dépendent du transport en commun sont largement pénalisées par l’offre de services lacunaire en ce qui concerne la fréquence et la fiabilité des passages, ainsi que par les freins à l’accessibilité dans le réseau d’autobus et de métro. Les entraves à leur mobilité génèrent du stress et des pertes de temps. À cela s’ajoutent les coûts que représentent l’utilisation des transports en commun et le sentiment d’insécurité pouvant survenir lors des déplacements ou des périodes d’attente qui n’affectent pas toutes les femmes de la même manière (Courcy et al., 2022). Certains quartiers sont particulièrement mal desservis, ce qui limite les activités quotidiennes des femmes, les pénalise à différents niveaux (financier, social ou alimentaire, notamment) et peut générer de l’isolement.

La marche et le vélo sont les principaux modes de déplacement actif employés par les Montréalaises au quotidien. L’adoption de modes de transport actif varie cependant d’un quartier à l’autre en fonction des infrastructures, qui sont parfois vétustes ou absentes. Outre la présence et la qualité des aménagements favorisant le transport actif (INSPQ, 2013), l’enjeu de la sécurité urbaine – qu’il s’agisse de la hausse des violences armées dans certains secteurs montréalais ou le harcèlement de rue (Blais et al., 2021) – représente également un frein important au bien-être des femmes dans les espaces publics et lors des déplacements.

L’accessibilité des parcs et des espaces naturels

L’existence et l’accessibilité des espaces verts en ville est une dimension cruciale du bien-être de la population citadine. Lieux de détente et de loisir, de rassemblement et d’activités sportives, les parcs et espaces verts ont un impact positif sur la santé physique et mentale; d’une part parce qu’ils favorisent la pratique d’une variété d’activités physiques, d’autre part parce qu’ils offrent des îlots de fraîcheur l’été et jouent un rôle dans la qualité de l’air et la réduction de la pollution atmosphérique (Benedict et McMahon, 2006). À cela s’ajoute leur rôle central dans le maintien de la biodiversité des écosystèmes naturels en ville.

Si Montréal comporte de nombreux parcs et espaces verts, leur répartition reste inégale sur le territoire de la métropole, créant des enjeux d’accessibilité pour les femmes dans plusieurs secteurs. De plus, ces espaces publics comportent fréquemment des lacunes en termes de services (c.-à-d. des toilettes publiques) et que leur utilisation est marquée par des dynamiques genrées, souvent au détriment des femmes (Day, 2000; Kern, 2019). La vigilance reste de mise quant au risque d’embourgeoisement « vert » que les initiatives de verdissement peuvent entraîner (Meerow, 2020; Rigolon et Németh, 2020; Ottaviano, 2020; Gould et Lewis, 2016).

L’accessibilité des services et des commerces de proximité

À Montréal, l’accessibilité à des services et des commerces de proximité diversifiés varie fortement en fonction des quartiers. Pourtant, cette vitalité est nécessaire à la résilience et au bien-être des populations locales. Deux tendances préoccupent particulièrement les intervenantes des organismes communautaires consultés. Tout d’abord, la dévitalisation de certains quartiers, où l’offre de services et de commerces de proximité est restreinte – notamment dans les quartiers qui peuvent être qualifiés de déserts alimentaires. Dans ces secteurs, les femmes, généralement responsables des achats du quotidien, font face à une double contrainte pour leurs approvisionnements en produits alimentaires et de base : en plus de devoir parcourir de plus grandes distances pour accéder aux biens et services, elles sont souvent confrontées aux lacunes de l’offre de transports en commun. Dans bien des cas, ces limites les conduisent à effectuer leurs achats dans de plus petits commerces situés plus près de leur domicile, où l’offre de produits frais est toutefois réduite et les prix, généralement plus élevés que dans les grandes surfaces.

L’autre tendance est l’embourgeoisement, qui non seulement nuit à la capacité de se loger de manière adéquate pour une population marginalisée et économiquement précaire, mais transforme également l’offre commerciale des quartiers, auparavant abordables, où cette même population a du mal à trouver les produits de base à prix modique (Guay et al., 2019).

Une volonté d’implication citoyenne

À la lumière des discussions avec les participantes, nous constatons que les femmes se mobilisent de différentes manières pour l’environnement, tant à l’échelle de leurs choix individuels que dans des mouvements militants et dans leurs revendications politiques. Elles développent une connaissance pertinente des besoins et défis particuliers de leurs quartiers en matière de justice sociale et environnementale. Le milieu communautaire et associatif joue un rôle névralgique en faisant entendre et en amplifiant ces voix qui ont souvent du mal à se rendre dans les instances décisionnelles ou à être prises au sérieux. Grâce à leur proximité avec les populations locales, les organismes communautaires et groupes citoyens sont des acteurs stratégiques pour une transition écologique juste.

Conclusion

Un certain consensus se dégage dans la littérature concernant le rôle déterminant du genre, autant dans les perceptions et les impacts des changements climatiques que dans le type de solutions envisagées et leurs effets. Il s’accompagne du constat qu’une approche interdisciplinaire et transversale est nécessaire afin de mener une lutte aux changements climatiques efficace, juste et équitable. Cette transition socioécologique requiert des changements structurels dans tous les domaines, allant de l’économie à l’alimentation en passant par la mobilité, la santé, l’aménagement du territoire et l’habitation.

Les constats qui émanent de cette recherche s’inscrivent en continuité avec la littérature scientifique existante. Les enjeux que rencontrent les Montréalaises dans leur quotidien sont interdépendants et intrinsèquement liés à la résilience de cette population face aux changements climatiques. Le genre influence grandement l’expérience qu’elles ont de la ville, de l’utilisation de ses services et espaces et de l’accès à ceux-ci. Le genre n’est toutefois pas un facteur de vulnérabilité « naturel ». Il résulte plutôt de décisions politiques et historiques d’aménagement et d’inégalités sociospatiales qui se matérialisent sous la forme de facteurs de vulnérabilité. Pour que la lutte aux changements climatiques ne laisse personne derrière, il faut agir simultanément sur la réduction des inégalités sociales. C’est pourquoi la transition écologique se doit d’être féministe.
[1] La binarité de ce texte provient du fait que la recherche se base sur une littérature scientifique qui elle-même s’appuie sur des statistiques reproduisant les catégories binaires d’hommes et de femmes (McCright, 2010). Il demeure toutefois pertinent de s’intéresser à l’influence du rapport à la masculinité et à la féminité en lien avec les enjeux relatifs aux changements climatiques (Lieu et al., 2020).

[2] Le travail de recherche qui a été mené se base sur une revue de la littérature que le Conseil des Montréalaises a fournie aux chercheuses. Cette dernière a été réalisée à l’été 2021 par Simona Bobrow, Jen Gobby, Rosalie Thibault et Leila Cantave.

[3] La détermination des mots-clés pour la recherche dans les bases de données s’est concentrée autour du genre et du « changement climatique », délaissant différentes dimensions importantes et essentielles pour une analyse intersectionnelle complète. Plusieurs aspects de la problématique ont été mis de côté, comme la littérature qui porte sur le Sud global ou qui en est issue, celle axée sur les peuples autochtones ainsi que les documents portant notamment sur les dimensions de classe ou de race mais n’intégrant pas la dimension du genre.

[4] Le travail de care renvoie à toute forme de travail, rémunéré ou non, consistant à « répondre à des besoins de soins, d’éducation, de soutien ou d’assistance aux autres » (Cordeau, 2021). Il s’agit d’un travail qui implique généralement une charge émotionnelle ainsi qu’une variété de connaissances techniques et de compétences relatives à la psychologie et aux habiletés relationnelles.

[5] Les quartiers au croisement de ces trois cartes sont Montréal-Nord, Rivière-des-Prairies, Pointe-aux-Trembles, Mercier–Hochelaga-Maisonneuve, Pointe-Saint-Charles, Ville-Émard, Lachine, Pierrefonds, Ahuntsic-Cartierville, Parc-Extension et Saint-Michel. Évidemment, les femmes qui habitent ces quartiers ne forment pas un bloc monolithique. Nous pouvons toutefois considérer que le fait d’y résider n’est pas le fruit du hasard, mais plutôt le résultat de l’accumulation de différentes formes de discriminations et d’oppression contraignant ces femmes à vivre dans des secteurs les exposant plus fortement à des risques variés, notamment en lien avec les changements climatiques.

 

Pour citer cet article

Léonard, N., Madénian, H., Perras St-Jean, G. (2022). Pour une transition écologique juste et féministe à Montréal. Dans Répertoire de recherche Villes, climat et inégalités. VRM – Villes Régions Monde. https://www.vrm.ca/pour-une-transition-ecologique-juste-et-feministe-a-montreal

Texte source
Conseil des Montréalaises (2022). Avis – Pour une transition écologique juste et féministe à Montréal. Montréal, 71 pages.
Bibliographie
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