Espace_temps2_AfficheInformations

21, 22 et 23 octobre 2015
INRS – Urbanisation Culture Société
385, rue Sherbrooke Est (Montréal)
(Métro Sherbrooke)

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Présentation de l’événement

En 2010, un colloque organisé par des membres du pôle Ouest de l’Institut des Amériques, à Brest, intitulé « L’espace dans les Amériques » et un ouvrage, L’espace du Nouveau Monde. Mythologies et ancrages territoriaux, publié en 2013, ont tous deux été l’occasion d’aborder la notion d’espace par différentes réflexions émanant de nombreux points de vue disciplinaires (géographie, littérature, science politique, urbanistes, historiens, etc.) et en multipliant les regards spécifiques (Europe, Amériques, Caraïbes). En caractérisant celui-ci de concret, de relationnel, d’actant et de construit, ces deux temps ont balayé quelques manières de « faire avec l’espace », de le penser, de le structurer et de le pratiquer.Cet événement repose en grande partie sur les enseignements qui furent tirés de ces deux évènements mais s’en démarque en examinant un espace spécifique, l’urbain, en tant que  matérialisation formelle, fonctionnelle, symbolique et idéelle d’un jeu combinant des distances, des places et des placements de l’activité humaine (Lussault, 2013).

Argumentaire du colloque

Aujourd’hui, l’urbain répond à des propriétés rhizomiques (Deleuze et Guattari, 1980) de complexité, de diversité, de décentralisation, d’émergence, de non linéarité, de mutabilité. Le rôle inédit et crucial de la connectivité et celui de la systématisation de la possibilité de connexion exigent tous deux de nouveaux outils d’analyse et d’exploration ainsi qu’une nouvelle manière de penser. L’absence de limites clairement identifiables qui caractérise l’urbain contemporain, en tant que modalité dominante de production de l’espace, participe de ce malaise et du brouillage général de ses modes de lecture, alors même que cette modalité tend à se reproduire à l’identique (Laffont, 2015). Que cela soit en termes de pratiques ou en termes de lectures des mécanismes et processus à l’œuvre, la perception du temps semble l’emporter sur celle de l’espace.

Le temps est une catégorie d’analyse du monde social (Rosa, 2010). Qu’il soit question de systèmes techniques, sociaux, économiques, etc ; des acteurs individuels et collectifs, c’est le rapport entre passé, présent et avenir qui permet de comprendre les évolutions sociales et la transformation des rapports. Dès lors, le temps, c’est celui des horloges et des calendriers, de la physique, de la technique, de la coordination objective des activités et de la mesure quantitative des grandeurs mécaniques, exprimé en distances, en vitesses, en accélération. Ici, il n’est pas question de temporalités. Associé à la mobilité, ce même temps se pare d’un caractère stratégique où les réalités spatiales (faits de distance d’après Lussault, 2007) s’appréhendent en termes d’accessibilité. La substitution de la notion d’accessibilité à celle de distance (Picon, 1997) met donc en crise des distinctions cruciales, comme celles de centre et de périphérie. L’espace serait ainsi gommé, réduit à un statut d’étendue et le temps serait donc dominant. Le temps est toutefois multiple et il existe des temporalités distinctes et hétérogènes, des oppositions qualitatives.

Il y a tout d’abord le temps historique, celui de longue durée. C’est le temps du monde, une temporalité fondée sur la connaissance du passé, de sa profondeur. Il est structuré en périodes. Puis, il y a le temps biographique, celui de la vie. Il recoupe l’existence entière d’un individu, il est fait d’une succession d’expériences et d’attentes fondées sur des anticipations successives de futurs contraints, probables, possibles. Entre histoire et action, c’est le temps de l’habiter. Ensuite, il y a le temps quotidien, celui de l’action, du court terme, de l’articulation entre un passé proche qui se prolonge et un avenir déjà en marche. C’est le temps où la réflexivité de l’individu entre en jeu. Il y a aussi le temps sacral, mythique, sorte de bouclage entre un passé primordial (création) et une fin des temps programmée (l’apocalypse). À cela, s’ajoute, du point de vue individuel, en lien avec les oppositions qualitatives précédemment citées, la dissociation entre un temps abstrait (chronologique) et un temps des évènements (vécu) qui, dissocie le temps calculé du temps estimé, remémoré. Enfin, notons l’opposition entre le temps contraint, objectivable, paramétrable et les temps libres et choisis (Grossin, Chesnaux, 1996).

Puis, en souscrivant à la dimension stratégique que le temps revêt aujourd’hui, si être mobile signifie faire usage d’un capital pour affirmer ou tendre vers une position spatiale et vers l’affirmation d’une position sociale (Ramadier et al. ; 2007, Lussault, 2008), le risque est alors grand de céder à une « idéologie mobilitaire » (Mincke et Montulet, 2010) devenue dominante, mais aussi largement contraignante et inégalitaire. Accorder une place trop importante à l’accessibilité, à la mobilité et donc à une primauté du temps sur l’espace, serait oublier que mobilité et ancrage forment un couple difficile à dissocier (Feildel 2011). Il est nécessaire de ne pas omettre cette dimension fondamentale du mouvement, du placement et du dé-placement : celle qui l’inscrit dans l’espace, l’ancrage.

À l’énoncé de ce propos, en écho à ce que nous présentions comme constat dans le premier paragraphe de cet argumentaire, le temps ne l’emporte pas sur l’espace d’abord, il n’existe pas en tant que tel et regroupe, sous cette dénomination l’ensemble des relations de succession et de durée des évènements, mais aussi l’ensemble des représentations et des usages du temps par les opérateurs (Lévy, Lussault, 2003, Schnell, 2007). Puis, la relation des individus à la temporalité est aujourd’hui beaucoup plus complexe et différenciée qu’auparavant. C’est cette réalité que l’on tente d’ériger en primauté du temps sur l’espace et que l’association mobilité/ancrage vient à la fois confirmer en tant que constat de faits mais infirmer en tant qu’idéologie dominante. Un effet de balancier s’opère et l’on se penche alors vers l’espace, au risque, comme Soja le fit en son temps, de militer pour une réévaluation de l’espace. Or, si l’on partage aisément le constat que l’espace est demeuré, au sein des idéologies, des représentations sociales et au sein des sciences sociales trop longtemps assujetti au temps, il n’en est pas pour autant supérieur.

À ces éléments d’analyses, il convient aussi de mobiliser, dans cet argumentaire, la persistance, voire la résistance de certains éléments, qui indique que les rapports sociaux demeurent foncièrement inscrits dans l’espace et dans le temps, sans que l’une de ces dimensions ne l’emporte nécessairement sur l’autre. Certes, l’accélération de nos rythmes de vie (Rosa, 2012) fait du temps et de son écoulement le pivot de nos comportements. Néanmoins, parler d’une primauté du temps sur l’espace reviendrait à négliger l’idée que ce n’est pas tant la vitesse qui importe de nos jours que la capacité de l’individu à tirer profit des lieux et d’optimiser leur mise en système (Laffont, Martouzet, 2014). De même, si l’absence de localisation d’un certain nombre de nos pratiques quotidiennes conduit à la multiplication de non-lieux (Rosa, 2012), il se dessine en parallèle de nombreux appels à la création de sens et de lien, notamment dans le domaine de l’aménagement et de l’urbanisme. Les nombreuses répliques de projet urbain que l’on retrouve d’une ville à l’autre érode l’acceptabilité sociale de celui-ci et il n’est pas rare de voir que l’opposition populaire à ce type d’aménagement trouve sa source dans la volonté de préserver un « sens du lieu » (Bédard et al. 2013). Dans un même ordre d’idées, d’autres font l’ « éloge de l’errance » et de notre rapport sensible à la ville afin de retrouver notre capacité à rêver…(Gwiazdzinski, 2009).

Ces éléments de résistance rappellent que notre rapport à l’espace et au temps demeure inégal par définition. Cette relation n’est en effet pas sans lien avec le capital social de chacun rappelant ainsi le triptyque de Soja : « [t]here are three rather than two fundamental or ontological qualities of human existence, from which all knowledge follows : the social/societal, the temporal/historical, and the spatial/geographical » (Soja, 2010 : 70). Les récents mouvements sociaux à travers le monde ont par ailleurs montré que si les télécommunications favorisent l’occupation des lieux, l’espace et le temps sont loin d’être des éléments de décor, mais participent à la négociation de l’identité de l’individu et de sa communauté. Tout cela va dans le sens que l’espace et le temps sont « les supports inséparable de notre vie sociale » ( Cauvin et Gwiazdzinski, 2002 : 63)

L’objectif de ce colloque est de revenir sur le rapport que nous entretenons aujourd’hui à l’espace-temps. Si la perspective se veut d’abord et avant tout géographique – et que les contributions posant les jalons d’une réflexion sur la notion de l’espace-temps au sein de la discipline sont plus que bienvenues – l’appel est ouvert à toutes les disciplines.

Comité organisateur et scientifique

Sandra BREUX, INRS – Urbanisation Culture Société, Montréal, Canada

Georges-Henry LAFFONT – UMR 7324 CITERES, Équipe Ingénierie du Projet d’Aménagement, Paysage et Environnement, Université François-Rabelais de Tours (Tours, France)

Comité Scientifique

Sandra BREUX, INRS – Urbanisation Culture Société, Montréal, Canada

Mario BÉDARD – Département de géographie, Université du Québec à Montréal, Canada

Gilles CHAMEROIS, Université de Bretagne Occidentale (Brest, France)

Georges-Henry LAFFONT – UMR 7324 CITERES, Équipe Ingénierie du Projet d’Aménagement, Paysage et Environnement, Université François-Rabelais de Tours (Tours, France)

Guy MERCIER, département de géographie, Université Laval (Québec, Canada)

Denis MARTOUZET – UMR 7324 CITERES, Equipe Ingéniérie du Projet d’Aménagement, Paysage et Environnement, Université François Rabelais de Tours, France.

Programme détaillé

21 octobre

Soirée apéritive à partir de 17 h
Salle 2109 (2e étage)

  • Accueil et inscriptions des participant(e)s
  • Mot des organisateurs et des partenaires
  • Animation par Georges-Henri LAFFONT et Mario BÉDARD : « Coupes mobiles des rapports à l’espace-temps : distance(s), sens, expérience(s) au cinéma ». Analyse de séquences et discussions autour de films.

22 octobre

Ateliers
INRS – Urbanisation Culture Société, Salle 2109 (2e étage)

8 h 30 – 9 h
Accueil, café et croissants

9 h – 12 h

Atelier 1 – « Éternel présent et horizon infini vs historicité et finitude(s) »

Thématique 1 : La notion de projet

Participant(e)s : Mathieu ADAM, Gabriel GONZALEZ, Jean GROBELLET, Hanna CHÉRIF, Clément QUAEYBEUR, Sandra MALLET, Jean-Yves PETITEAU

Thématique 2 : Les temporalités des villes

Participant(e)s : David CHAMPAGNE, Isabelle CHESNEAU, Richard, COHEN, Gabriel GONZALEZ, Jean GROBELLET, Laurence ISELIN, Annie OUELLET, Mylène PARDOEN, Clément QUAEYBEUR. Alexandre RIGAL

12 h – 13 h 30
Lunch sur place

13 h 30 – 16 h
Atelier 2 – « À mi-chemin entre avoir prise et laisser une trace »

Thématique 1 : Du patrimoine au lien

Participant(e)s : David CHAMPAGNE, Laurence ISELIN, Marie KORTAM, Georges-Henry LAFFONT, Denis MARTOUZET,  Annie OUELLET, Mylène PARDOEN

Thématique 2 : Expérience(s) et construction du sens

Participant(e)s : David CHAMPAGNE, Richard, COHEN, Paulette DUARTE, Laurence ISELIN, Marie KORTAM, Georges-Henry LAFFONT, Denis MARTOUZETAnnie OUELLET, Mylène PARDOEN, Alexandre RIGAL

18 h

Balade autour du Boulevard Saint-Laurent en métro, en transport en communs, à pied, l’idée est d’expérimenter « trois modes » de mise en relation de l’espace et du temps sur un parcours donné. Des points de rendez-vous potentiels seront proposés et seront effectifs en fonction des « durées » de parcours, des « itinéraires » choisis, des « conditions extérieures » facilitant, entravant les dits parcours ou encore des « stratégies » adoptées par trois groupes dont la composition sera le fruit hasard! La soirée peut se poursuivre suivant le bon vouloir et les envies des participants.

23 octobre

Ateliers
INRS – Urbanisation Culture Société, Salle 2109 (2e étage)

8 h 30 – 9 h
Accueil, café et croissants

9 h – 12 h
Atelier 1 : « Penser et représenter les rapports à l’espace et au temps »

Thématique 1 : La balade du Boulevard Saint-Laurent

Discussion de groupe

Thématique 2 : Psycho-géographie et habiter

Discussion de groupe

12 h – 13 h
Lunch sur place

13 h – 15 h
Synthèses et perspectives

Inscription

Gratuit et ouvert à tous. Si vous souhaitez participer à cet événement, SVP faire parvenir un courriel à Valérie Vincent  en indiquant le/les atelier/s auxquels vous souhaitez assister.