Profil Pro – Rencontre avec Simon Chouinard-Laliberté – Analyste de politiques principal au sein du Bureau des stratégies régionales

Octobre 2024

Entretien effectué par Salomé Vallette, coordonnatrice de Villes Régions Monde
Transcription faite par Nathan Mascaro, étudiant au doctorat en études urbaines à l’INRS

Pouvez-vous nous parler de votre parcours scolaire et professionnel, quelles sont les étapes qui ont permis d’œuvrer au sein de Ressources naturelles Canada?

J’ai commencé mon parcours par un baccalauréat en science politique, à l’Université de Montréal, avec une concentration en économie. À cette époque, mes intérêts se portaient principalement sur les politiques canadiennes et québécoises, le développement économique, les études urbaines et les liens entre les politiques publiques et l’économie. Ces sujets m’ont naturellement orienté vers une maîtrise en urbanisme à l’Université de Montréal. En plus de mes études, mon engagement dans le sport universitaire avec les Carabins en athlétisme m’a permis de développer des aptitudes interpersonnelles, de leadership, et un fort sentiment d’engagement communautaire. J’ai également été membre du conseil d’administration de l’équipe d’athlétisme, pendant quatre ans, ce qui a renforcé ces compétences.

Au début de ma maîtrise, je pensais m’orienter vers le domaine du transport, mais j’ai rapidement réalisé que mon véritable intérêt portait sur l’articulation des politiques publiques – qu’elles soient municipales, provinciales ou fédérales – et sur la manière dont elles s’intègrent aux dynamiques régionales et locales. Cet intérêt m’a conduit à réaliser un travail dirigé sur la gouvernance du développement économique dans les quartiers centraux de Montréal, analysant l’organisation des politiques publiques économiques au Québec et leur influence à l’échelle locale. Peu de recherches avaient été menées sur ce sujet, et j’ai pu explorer des questions portant sur l’évolution de la gouvernance locale et ses différents cadres d’analyse.

Par la suite, j’ai obtenu un contrat de recherche avec l’ÉNAP pour une étude pancanadienne sur la gouvernance des politiques de transport collectif, pour laquelle j’étais responsable du cas de l’Ontario. Ce projet m’a permis de plonger dans la gouvernance du transport collectif et plus particulièrement sur le cas de la région de Toronto, ce qui représentait un terrain d’étude nouveau et enrichissant.

J’ai ensuite occupé un poste à temps plein au Centre d’Écologie Urbaine de Montréal, où j’ai travaillé sur des projets de mobilité durable, de participation citoyenne, et de consultations publiques. L’un de mes projets principaux était un partenariat avec la Chaire internationale sur les usages et pratiques de la ville intelligente de Florence Paulhiac (UQAM) pour développer un guide sur les rues conviviales, ou « complete streets » en anglais. Ce guide, complété par une analyse des impacts économiques des aménagements, visait à proposer des pratiques adaptées aux contextes urbains du Québec.

Aujourd’hui, je suis analyste de politiques senior au sein du Bureau des stratégies régionales de Ressources naturelles Canada. Mon expertise repose sur une vision transversale des politiques publiques, de leur application fédérale à leur impact local, tout en intégrant des enjeux environnementaux et de développement durable. C’est par un programme de recrutement fédéral que j’ai obtenu le poste. C’est un programme de développement et de perfectionnement d’analyse politique. Ce programme a pour objectif d’embaucher des analystes qui pourraient se développer dans la fonction publique. Le programme comprend deux rotations dans différentes équipes, ce qui a diversifié mon expérience et élargit mes perspectives.

Dans la première rotation, j’ai participé à la coordination des actions climatiques de Ressources naturelles Canada en collaboration avec le ministère de l’Environnement. Cette équipe était responsable de coordonner les actions, les stratégies en matière de changement climatique au sein du ministère.

Lors de ma deuxième rotation, j’ai travaillé au sein du Bureau des stratégies régionales. L’objectif principal était de collaborer avec les provinces et territoires afin de permettre de positionner l’économie du Canada pour qu’elle soit prête à la transition énergétique et à la carboneutralité, tout en maintenant un équilibre économique. Concrètement, il s’agissait de discussions avec divers acteurs, notamment les provinces, les territoires, les partenaires autochtones, les entreprises privées, les universités et d’autres parties prenantes afin de permettre l’avancement des priorités en lien avec la transition énergétique et à la carboneutralité, tout en maintenant un équilibre économique. Je trouve ce travail extrêmement enrichissant, car il combine mes intérêts en matière de politiques publiques, d’économie et de développement durable, tout en m’exposant à un large éventail d’approches stratégiques pour faire face aux enjeux climatiques et énergétiques actuels et futurs. J’ai eu la chance d’être au sein de l’équipe lors du développement de cette approche, ce qui m’a permis de vivre de très belles expériences.

Quels sont les aspects que vous aimez le plus de votre travail ? Est-ce que vous rencontrez certaines limites?

Le fait d’apprendre beaucoup et d’être exposé à des enjeux et des sujets que je ne connaissais pas et de faire un maillage, donc un lien, avec mes différentes capacités et des nouvelles est très enrichissant.

Un des moments clés que j’ai vécu pendant cette première année en poste, a été d’être au cœur du développement du plan de réduction des émissions 2030 du gouvernement, notamment concernant le volet des mesures qui s’applique à Ressources naturelles Canada. Ça a été une expérience très enrichissante. La beauté de ce ministère c’est la variété des sujets. J’ai beaucoup appris et maintenant je suis assez à l’aise de discuter de projets de développement d’électricité propre. La liste est longue, on parle d’hydroélectricité, d’éolien, de solaire, d’hydrogène et de minéraux critiques. Ça m’a exposé à des enjeux et des sujets que je ne connaissais pas. Ça met permet de faire un maillage entre les connaissances que j’avais et les nouvelles connaissances que je suis en train d’acquérir.

Un autre élément positif c’est l’impression d’avoir un impact significatif dans la vie des citoyens sur le long terme. Je travaille chaque jour avec cet objectif-là. Comment je peux faire une différence positive pour la société dans laquelle je vis et pour les concitoyen·ne·s ?

Par rapport aux limites, je dirais qu’il s’agit de l’impact. On veut avoir un impact sur la société, mais c’est certain qu’on travaille sur des projets de longue haleine et qui doivent tenir compte de plusieurs considérations. Donc, c’est sûr que ça fait un peu partie des limites, parce qu’on le sait, les changements climatiques, ça se passe maintenant. D’un autre côté, on ne peut pas improviser des mesures, improviser des plans pour aujourd’hui sans tenir compte de demain.

Comment faites-vous pour demeurer au fait des actualités dans votre domaine et comment imaginez-vous votre secteur dans les prochaines années?

Je m’efforce de rester le plus connecté possible aux actualités de mon domaine. Les réseaux interpersonnels se bâtissent à travers les cercles d’amis, et les anciens collègues d’université. Également, et cela peut sembler banal, mais les infolettres sont des outils précieux. Par exemple, je lis celle de l’Association des économistes du Québec qui traite d’une grande diversité de sujets. Je me garde du temps pour être curieux à travers ça.

Avec la multitude d’informations en circulation, il est important de faire des choix pour maintenir une perspective éclairée. Je m’accorde du temps pour approfondir des sujets variés – qu’il s’agisse des politiques publiques aux niveaux fédéral, provincial et municipal ou d’analyses économiques. Cela me permet de suivre les données actuelles et les projections, autant sur les émissions de gaz à effet de serre que sur l’évolution des marchés de l’énergie propre. Au sein de mon équipe, nous bénéficions de mécanismes efficaces de partage d’information. Même sans être directement impliqués dans certains dossiers, nous avons accès à des résumés étoffés qui nous aident à rester à jour rapidement.

Quant à l’évolution du secteur des énergies propres, je dirais qu’il est en pleine croissance, un euphémisme peut-être, mais je le décrirais surtout comme dynamique, et parfois instable. Les marchés émergents présentent des courbes d’apprentissage technologique et des chaînes d’approvisionnement complexes. Il y aura inévitablement des erreurs et des interruptions, mais ce sont des caractéristiques typiques des marchés en croissance.

En un mot, je décrirais ce secteur comme dynamique, dans tous les sens du terme, compte tenu de la nécessité de répondre aux besoins énergétiques, aux impératifs économiques, et aux enjeux des changements climatiques.

Note : Les commentaires partagés ne représentent en aucun cas les positions de Ressources naturelles Canada et du gouvernement du Canada.